Le peuple haïtien se meurt.
Lentement, mais sûrement. Inexorablement.
Chaque jour, les crimes, les assassinats, les meurtres, les tueries font désormais partie de notre quotidien. À cela s’ajoutent d’autres drames silencieux : ceux et celles qui meurent faute de soins, parce que nos hôpitaux sont fermés. Ceux et celles qui choisissent le suicide après avoir subi l’horreur d’un viol collectif. Ceux et celles qui n’ont plus accès aux ARV contre le VIH, ni aux médicaments essentiels contre la tuberculose. Ceux et celles qui meurent encore du choléra.
Toutes ces morts s’accumulent, dans l’indifférence glaciale des détenteurs du pouvoir.
Le pire dans tout cela, c’est que Haïti n’est pas en guerre. Ironie tragique : ce sont des Haïtiens qui tuent des Haïtiens.
Et comme pour parachever cette descente aux enfers, le mal est désormais banalisé. Hannah Arendt l’avait nommé : la banalité du mal. Nous y sommes.
Pendant trente ans, nous avons joué à l’autruche. Nous avons choisi de fermer les yeux. Un aveuglement volontaire, nourri par l’attentisme, l’inaction, le cynisme absolu. Pendant trente ans, le secteur politique a collaboré avec les bandits pour garder le pouvoir et s’enrichir. Pendant trente ans, une partie du secteur économique a pactisé avec ces mêmes bandits pour protéger ses privilèges. Tout cela pour préserver le gâteau — ou mieux, le bonbon sirop pour soi seul.
Sous les regards complaisants des pays dits « amis » et des organisations internationales, brandissant hypocritement la charte des droits de l’homme, la vie est détruite. Les moun ne sont plus des moun. La vie, tout simplement, n’a plus de sens.
Alors, la question s’impose, insistante :
À quand le sursaut des Haïtiens eux-mêmes ?
À quand la prise de conscience ?
À quand le refus de cette perte de notre mounite, de notre humanité même ?
À quand, encore à quand ?
Auguste D’Meza
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